dimanche 15 octobre 2017

QUE MA VOLONTÉ SOIT FAITE !

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Par Eric Ruiz

Non, je n’ai pas fait d’erreur dans mon titre.
Vous vous attendiez plutôt à :

« Seigneur que ta volonté soit faite ! »

Cette prière inspirée du « notre Père », je pense, est celle que doit recevoir notre Seigneur le plus souvent. Mais est-t-elle vraiment perçue par lui, ainsi ?
En d’autres mots :
Le cœur est-il en adéquation avec la bouche?
Je pense que bien souvent cette prière est annoncée avec l’intention suivante :

« Seigneur exauce ma prière ! Que MA volonté soit faite ! »

Nous savons que nous devons prier selon la volonté de notre Père pour être exaucé. Mais dans quel sens doit-on prier ?

« Ne vous inquiétez de rien; mais en toute chose faites connaître vos besoins à Dieu par des prières et des supplications, avec des actions de grâces. » Philippiens 4:6

Cette prière de faire connaître nos besoins devrait être faite (comme elle l’indique) dans la paix et la confiance. Or elle montre curieusement le plus souvent une inquiétude, une préoccupation à la base.
C’est donc l’anxiété qui devient le mobile pour établir une liste de requêtes, de vœux, de réclamations mêmes.
"Seigneur, j’ai besoin d’une voiture, Seigneur j’ai besoin d’un travail, d’une compagne, d’une maison, d’argent, d’amour, d’une guérison, ...etc"
Cette liste de besoins figure-t-elle dans la volonté du Seigneur ?
Pas forcément.
J’ai un ami qui me disait il n’y a pas si longtemps, "je me sens un peu coupable dans les prières que je fais à Dieu, car je n’ai pas envie de prier autre chose que : ta volonté soit faite !"

Ce frère en Christ est-il réfractaire à l’effort, ou peu inspiré ou a-t ’il tout simplement tort de prier ainsi?

Je pense qu’il n’a rien de tout cela et qu’il est sans doute plus dans la vérité, que ceux qui manifestent des listes de prières à n’en plus finir. Prier pour ses besoins de la sorte dévoilent plutôt un profond manque de foi.

Je pense que paradoxalement, plus notre prière est précise, qu’elle est détaillée et orientée, eh bien plus elle montre un manque de foi et d’abandon dans le Seigneur.

Aller, analysons la chose :
Notre prière ne ressemble-t-elle pas alors à un ordre que l’on donne à Dieu? Un commandement qui le mettrait même en face de sa parole, confronté à elle ?
Une sorte d’obligation et de devoir de sa part, pouvant même le faire menteur en cas d’absence de réponse?
Par exemple :
«  Tu as dit dans ta Parole que le juste ne manquerai de rien, alors Seigneur merci de pourvoir à mon besoin d’argent ».

Qui n’a jamais formulé ou entendu dire cette sorte de prière ?
En apparence une belle prière de foi, en apparence seulement, mais en profondeur cela ressemble plutôt à un commandement humain, un rappel à l’ordre, un ultimatum, bref un manque total d’amour, de confiance et de foi bien-sûr dans notre Seigneur.
Dieu n’a pas d’ordre à recevoir de quiconque.
Le vase n’a pas d’ordre à donner à son Potier.
Et pourtant combien de croyants semblent réclamer leur droit absolu à la bénédiction divine. 
Leur requête semble insinuer la chose suivante : « Comme je me suis sacrifié pour toi, j’ai logiquement et selon les Écritures, droit à recevoir une pluie abondante de bienfaits ».

Cela révèle une grande confusion :
A ce moment-là on confond deux sortes de foi :
La foi dans sa propre prière et la foi en Dieu.

Lorsqu’on a foi dans sa prière on manifeste la foi en soi. On augmente son estime de soi, puisqu’on s’estime apte, saint, justifié;
Dans les faits :
premièrement, on croit que sa requête est inspirée puis dans un deuxième temps on s’interdit de douter. On chasse toutes pensées de doute, les assimilant à des pensées démoniaques (alors que c’est la chair qui ne fait que s’exprimer ici ). Et troisièmement on confesse des paroles de remerciements, de louange comme si notre requête était déjà là, présente, sous nos yeux et bien réelle.
Et là on s’appuie sur le verset très connu et très utilisé d’Hébreux 11:1

« La foi est une ferme assurance des choses qu'on espère, une démonstration de celles qu'on ne voit pas. »

Mais voilà le mensonge est tellement proche de la vérité que beaucoup s’y laisse séduire. Et cela d’autant plus facilement, que notre chair avec ses désirs hurlent sans cesse ses besoins.
Le verset d’Hébreux 11 s’adresse à des croyants régénérés et pas à des croyants charnels. 
La preuve : Paul s’appuie sur les exemples de la foi d’Abel, louant son sacrifice, de la foi d’Enoch pour son enlèvement, de la foi de Noé saisie d’une crainte respectueuse, ou celle encore d’Abraham qui partit sans savoir où il allait.
En donnant tous ces exemples et bien d’autres, Paul insiste sur une foi possédant une confiance aveugle, déterminée, prête à tout et allant même jusqu’à subir des sévices terribles, des tortures menant à la mort, pour servir leur Seigneur. Là aussi le sacrifice est lié complètement à la foi

Alors comment ne pas concevoir la foi différemment d’une simple requête?
La demande et la confession de foi prend alors une toute autre tournure.
Revenons au deux sortes de foi :

·             Dans le premier cas (celui des croyants charnels) le croyant visualise sa requête.
Par exemple : il voit la voiture qu’il a demandée au Seigneur et il a une ferme assurance d’obtenir la voiture qu’il espère ; il en parle à tout le monde et il se voit même la conduire ; l’image de lui assis derrière le volant est de plus en plus nette.
C’est de la pensée positive, très en vogue avec le New-âge.
Cette prière pourra s’exaucée néanmoins, mais à travers des lois spirituelles.
Rien ne dit que le Seigneur est derrière cela. Le résultat, c’est souvent même une bénédiction humaine et non une bénédiction divine.
·             Dans le deuxième cas, le croyant s’attend sans rien voir, à l’intervention de Dieu, il s’attend à l’inattendu, à l’imprévu.
Connaissant justement les voies insondables du Seigneur, il se force même à ne rien imaginer, car la réponse qu’il va obtenir le surprendra bien souvent. Il sera surpris du résultat, du moment, de la manière et de la tournure que prendra son exaucement.
Sa foi ne s’attachera pas à l’objet mais au sujet, c’est-à-dire non pas à ce qu’il a demandé, mais à la fidélité de Dieu et à sa justification.
Dieu répondra favorablement quoiqu’il arrive et dans tous les cas.

Prenons l’exemple de l’apôtre Paul dans ses nombreux voyages, demandait-il qu’on prie pour que Dieu ou que ses anges le garde?
Priait-il pour sa sécurité ? Pour que tout se passe dans le calme et la sérénité ? Priait-il pour qu’il puisse avoir de nombreuses guérisons et une multitude de miracles ?
Tout cela il faut le reconnaître fait partie des incontournables prières « des saints » d’aujourd’hui, mais pas du tout des prières de nos pères dans la foi.

Au chapitre 16 verset 6 des Actes on remarque bizarrement que Paul est même empêché par le Saint-Esprit d’annoncer l’Evangile en Asie. Et c’est par une vision qu’il se dirigera ailleurs.
Nous n’avons pas ici de démons qui s’opposent à lui, mais le Saint-Esprit.
Concrètement, comment le Saint-Esprit pouvait-il s’opposer à lui?
En lui mettant des embûches, des épreuves, des pièges, en laissant ses ennemis l’attaquer et le persécuter.
Paul devait sans doute prier : « Père que ta volonté soit faite », c’est tout.
Pourquoi ?
Car il savait que de Jérusalem à Rome son chemin serait tortueux, semé d’embûches, de problèmes en tous genres et de changements de dernières minutes. Mais il savait qu’il se rendrait dans tous les cas à Rome.
Dans quel état ?
Par quels moyens ?
Dans combien de temps ?
Ces questions étaient pour lui hors de sens, ce n’était pas son souci.
Il remettait constamment son sort entre les mains du Seigneur qui décidait de ses déplacements comme de ses combats, de ses souffrances et de ses victoires.

Paul devait en fait prier dans le sens de recevoir de la force et du courage, pour mener à bien sa mission, un point c’est tout.

Cette indice nous l’avons notamment au chapitre 23 des Actes verset 11, puisqu’après que des soldats l’eurent emmené dans une forteresse pour qu’il ne se fasse pas lyncher par une foule en colère contre lui, on peut lire que la nuit suivante, le Seigneur apparu à Paul pour lui dire de prendre courage parce qu’il devait rendre le même témoignage à Rome que celui qu’il a rendu à Jérusalem.
Donc Paul qui avait dû prier pour être fortifié dans l’épreuve, fut sans doute étonné par la réponse du Seigneur, lorsqu’un ange apparu dans le ciel pour le fortifier de cette manière.

Autre exemple: Lorsque Paul écrit à l’Eglise de Colosse, nous apprenons qu’il est en prison. A quel moment fait-il la demande aux Colossiens de prier pour sa libération ?

Il terminera juste sa lettre par "souvenez-vous de mes liens", pas dans le but de se faire plaindre où d’attirer sur lui l’attendrissement général, mais pour les exhorter à la piété ; et il leur demandera de prier plutôt pour l’opportunité qu’il a d’être en prison. Priez pour moi Colossiens, mais pas pour qu’une porte s’ouvre vers l’extérieur, mais dans le sens qu’une porte s’ouvre pour annoncer le mystère de Christ.

Donc soyons zélés, Paul ne peut pas prier contre ce qu’il enseigne.
Il adore le Père en Esprit et en vérité.
Quand il exhorte les Romains en leur disant de faire mourir les actions du corps et de la chair, ou lorsqu’il leur conjure de ne pas vivre sous un esprit de servitude et de crainte, il veut leur faire remarquez que leurs prières comme leurs actions sont bien différentes de ce qu’il croit, lui.
Que croit-il, lui, justement ?
« Tous ceux qui sont conduits par l’esprit de Dieu sont fils de Dieu…car vous avez reçu un esprit d’adoption.. » (Romains 8 :14). Cà c’est s’est ce que croit et manifeste Paul: un esprit d’adoption conduit par l’Esprit de Dieu.

On ne devrait pas prier selon notre volonté, mais faire comme Jésus qui voulut nous enseigner que la chair refuse de prendre la dernière coupe ; la chair refuse la souffrance, elle rejette la coupe de la souffrance.

« Père, si tu voulais éloigner de moi cette coupe ! Toutefois, que ma volonté ne se fasse pas, mais la tienne. »

Contrairement à nos désirs et à notre envie de confort, nous devons nous attendre à souffrir, et à endurer des épreuves pour le Seigneur. Et nous ne devons pas prier pour qu’il aplanisse notre chemin et y enlève les obstacles. Sinon, c’est notre couronne que nous jetons à terre, cette couronne de vie ou de gloire qui s’obtient dans la persévérance et dans la persécution.

Un disciple prie dans le sens de la justice et sa prière devrait s’orienter très souvent vers cette réponse que Jésus faisait aux religieux.

« Je ne fais rien de moi-même...parce que je ne cherche pas ma volonté mais la volonté de celui qui m'a envoyé. »

La réponse de Jésus, c’est vrai, est vague, peu précise et elle ne renseigne pas sur les choses à faire dans l’immédiat. Elle témoigne uniquement d’une dépendance totale.
Elle est très déstabilisante, reconnaissons-le pour un croyant tiède qui aime être rassuré sur son avenir et sur ce qu’il doit faire là maintenant, en tous les cas pour agir au plus vite.

Nous savons tous, nous croyants, que c’est dans la faiblesse que nous sommes rendus fort. « L’Esprit nous aide dans notre faiblesse, car nous ne savons pas ce qu’il convient de demander dans nos prières » (Romains 8 :26)
Laissons le Seigneur s’exprimer à travers nous, même par des soupirs inexprimables, c’est lui qui sonde les cœurs et c’est lui qui nous parle.

Alors prions :
« Seigneur! Que ta volonté soit faite et non la mienne ! Et n’éloigne de moi aucune coupe de souffrance et de sacrifice, car je sais qu’avec toi je peux tout supporter ! »

Cependant, il ne faut pas s’illusionner et se voiler la face, mais le constat est là : malgré l’envie et leur désir sincère, beaucoup ne parviennent pas à faire la volonté de Dieu, pourquoi?

Eh bien il leur manque une étape ; et cette étape c’est d’être comme l’agneau, comme cet animal de sacrifice.
Alors offrons nos corps en sacrifice comme une offrande, comme Jésus a été l'agneau immolé.
Paul nous montre par sa vie, que son but n’était pas d’échapper à ses agresseurs, ou de fuir le mal, mais d’attacher sur l’autel des sacrifices, la partie de sa chair qui refusait de mourir en lui et de l’attacher avec des liens d’amour (car ces liens sont placés par amour pour notre Dieu en premier).
Si nous avons la même intention que Paul, Dieu nous aidera alors à sacrifier sur l’autel ce qui est trop longtemps resté accroché à nous.

Des exemples de chair à brûler ?
Ce sont des parties de nous que nous que nous avons chéri, à force dans être l'esclave.
Ce sont des paroles de médisances, de la calomnie, des paroles de jugement contre des proches ou contre les gens du monde, une grande émotivité qui passe avant la paix intérieure, s’enflammer pour tout et pour rien, prendre une place qui n’est pas la sienne, parler hors contexte de ses anciens péchés, contester sans cesse les conseils, se placer en donneur de leçons, être moralisateur à souhait, se vanter d’œuvres que l’on fait pour Dieu, se rabaisser au contraire constamment, s’en vouloir et se placer toujours en victime lors d’un échec, se sentir incapable, inutile et le confesser, avoir des pensées obsédantes, se sentir fatigué et lassé de tout…etc.

Ces démons doivent être chassés, confessées et consumées, il est temps ensuite de nous éloigner de l’autel et de ne plus regarder ni de ne plus parler de ce qui a été brûlé, sacrifié et abandonné au Seigneur et cela pendant un certain temps, le temps que la purification totale puisse être faite (il y a un nombre de jours nécessaire à accomplir, je le redis)

Par conséquent, offrir cette part douloureuse car aimante, de notre chair comme un sacrifice : c’est l’offrande suprême qui nous permettra réellement de prier : « Père que ta volonté soit faite » sans regarder en arrière et sans regretter ce qui a été mis sur l’autel. Cette ferme décision nous débarrassera profondément du vieil homme, de cette vielle nature qui refuse de faire la volonté de Dieu.

Amen

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