dimanche 3 juillet 2016

DOIT-ON DIRE TOUTE LA VÉRITÉ ?

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Par Eric Ruiz

En ce mois d'épreuves du baccalauréat, j'ai un beau sujet de philosophie à vous soumettre: (mais je ne vais pas le traiter en tant que tel, rassurez-vous)

  • Pensez-vous que "Toute vérité n'est pas bonne à dire" ?

De quelle vérité parle-t-on en général ?

Dans bien des cas, de celle qui est la nôtre, la sienne propre, celle que chacun croit posséder et qui nous permet d'exercer notre droit à la parole, mais aussi notre franchise, notre discernement à voir les choses mieux que les autres.
Le but de cette sorte de vérité est le plus souvent de vouloir amener les autres à changer d'avis ou à leur faire adopter notre propre point de vue.

N'est-ce pas encore l'orgueil qui est le moteur de notre décision dans ces cas-là ?

C'est toujours le même scénario, celui de la paille et de la poutre.
Nous aimons tellement voir la paille dans l'œil de l'autre et la lui montrer (sans voir la poutre qui est dans notre propre œil évidemment) ; Nous aimons tellement lui faire remarquer son ou ses mauvais penchants, pensant (bien sûr inconsciemment) que notre bonne action ou notre courage nous lavera de nos mauvaises actions.

Et puis bien sûr il y a le cas contraire, où l'on préfère mieux se taire.

Car dire la vérité va nous mettre en porte à faux avec notre interlocuteur et nous allons
- premièrement : le décevoir.
- Deuxièmement : risquer de perdre son estime
- Troisièmement : risquer de perdre la belle image que nous montrons de nous-mêmes
- Quatrièmement : risquer de perdre certains privilèges acquis par notre relation et finir par passer pour un être négatif.

Alors: Parler, se taire ?
Quoi faire au final ?...
C'est notre orgueil qui dictera sa loi.
Quel dilemme !
La chair et ses œuvres compliquent toujours les choses.

C'est vrai qu'il y a un moment, une manière et une personne plus propice pour dire les choses.

La manière bien sûr pour nous croyants c'est l'amour : On veut dire les choses sans la volonté de nuire, mais pour édifier.

Mais cette façon d'agir n'est-elle pas déjà celle recherchée par beaucoup ?
Nous sommes dans une société où la morale implique de dire la vérité plutôt que de dissimuler les choses.
L'altruisme (rappelons-le est le contraire de l'égoïsme, on fait les choses pour les autres) n'est pas réservé qu'au seul croyant en Dieu.
C'est même un objectif prioritaire d'éducation en France.

J'étais cette semaine dans des réunions de travail. Certains voulaient en profiter pour dire des choses qu'ils avaient sur le cœur, et qu'ils pensaient justes, mais ils se demandaient qui étaient plus à même de pouvoir les dire et à quel moment cela serait plus profitable ; Et bien sûr de quelle manière se serait dit en essayant de ne pas être trop frontal dans les rapports et aussi trop agressif.
Parce que c'est vrai: Les rapports humains en général ne sont pas simples, pour ne pas dire qu'ils sont très compliqués.
Il faut user de diplomatie, de tact, d'une certaine sagesse, avoir de la psychologie pour dire les choses sans blesser l'autre, sans qu'il se sente agressé, ménager sa susceptibilité. Et en plus, sans que notre propre image en soit entachée (c'est très, très complexe, et bien souvent avec la meilleure volonté du monde, on obtient le contraire de ce qu'on espérait au départ.
Voulant dire un mot gentil, il est perçu méchamment, donc dire la vérité peut passer comme une vacherie.)
  • Le Seigneur Jésus-Christ, lui, qu'a-t-il fait?

A-t-il fait attention à ce que ses auditeurs ne se sentent pas déstabilisés?
A-t-il bien fait attention à ce que l'image qu'il incarnait de Dieu ne soit pas froissée, ni ternie ?

Non, loin de là.
Son but était d'attendre le moment favorable.
Favorable à qui ?
A lui , aux autres?
Non, favorable au Père, à son Père. A notre Père qui est aux cieux " Jésus disait :

 "En vérité, en vérité, je vous le dis, le Fils ne peut rien faire de lui-même, il ne fait que ce qu'il voit faire au Père; et tout ce que le Père fait, le Fils aussi le fait pareillement. Car le Père aime le Fils, et lui montre tout ce qu'il fait; et il lui montrera des œuvres plus grandes que celles-ci, afin que vous soyez dans l'étonnement " (Jean 5:19-20)

Jésus ne se faisait pas des nœuds dans la tête face à une situation, il faisait simplement ce que le Père lui mettait à l'Esprit.
Quelle forme allait-il utiliser ?

Allait-il dire les choses calmement ou bien les dire avec un ton ferme ou plutôt les dire d'une voix forte, ou encore employer la colère ou finalement ne rien dire et s'en aller ?

Tous ces choix là, n'ont jamais été de son ressort. Et pour un croyant mature cela non plus n'est pas de son ressort.
C'est encore le Père qui lui inspire tout cela.
Il n'y a en fait aucune anticipation à acquérir, ni aucune stratégie à imaginer ou à percevoir à l'avance.

Nous n'avons pas à faire de l'effet. Nous n'avons pas à jouer un rôle non plus (nous ne sommes pas des comédiens, nous ne montons pas sur un plateau de théâtre, ou sur un plateau de télévision).

C'est le Saint Esprit qui dirige.
C'est lui le chef d'orchestre et nous devons jouer une partition que nous ne connaissons pas et que nous n'avons jamais jouée auparavant.

C'est déstabilisant à premier vue, mais c'est tellement moins stressant de se confier dans le Créateur de toutes choses. La paix du Seigneur nous accompagne et il amène tout à la lumière.

"Si un homme ne naît de nouveau, il ne peut voir le royaume de Dieu."

J'ai repris volontairement ce verset, car
Nous devons, comme Jésus pour voir la vérité, voir le royaume de Dieu.
Le royaume c'est de dire et de faire uniquement ce qu'il nous inspire et rien d'autre.
C'est pourquoi Jésus nous dit de ne pas chercher le royaume à l'extérieur de nous mais au milieu de nous, en nous-mêmes dans notre propre tabernacle, là où se cache l'Arche de l'alliance, le Saint-Esprit qui nous enseigne tout.

Voir le royaume de Dieu, ce n'est pas avoir une vision des choses célestes.
Ce n'est pas non plus avoir l'espérance qu'après notre mort nous y habiterons.
Ce royaume existe, mais ce n'est pas celui-là dont il est fait mention ici.
Non, le mot grec employé ici et dans bien d'autres passages clés est "eido" [i'-do]
Qui a une deuxième signification, en plus de voir: celle de connaître, de percevoir la force, d'être habile dans ce savoir.
Jean utilise le même mot lorsque Jésus dit: 

"si tu connaissais (pas si tu voyais) le don de Dieu....c'est toi qui aurait demandé à boire "(Jean 4:10)

Jésus, dans ce contexte là, reprend une samaritaine parce qu'elle trouve injuste de lui donner à boire, elle, qui n'est pas judéenne.

Cette femme avait besoin de connaître le royaume de Dieu pour manifester les œuvres du Père. Elle avait donc, on le voit bien, besoin de recevoir "le don de Dieu" c'est-à-dire le baptême de l'Esprit, pour voir ce qui est juste et ce qui ne l'est pas, donc pour voir la vérité.
Avec l'Esprit de Dieu en elle, elle aurait vu que le Salut de Dieu n'est pas destiné qu'à une seule nation ou un seul peuple, en l'occurrence les Judéens (mal traduit par « juifs »), mais qu'il est destiné à tous.

Vous voyez, avec Jésus on n'est pas dans la philosophie, ni dans une quelconque démarche psychologique.
Jésus ne demande à aucun de ses disciples d'acquérir un savoir quelconque: scientifique, religieux, ou autre pour connaître la vérité.

Non, il s'agit d'une puissance surnaturelle: celle de recevoir le don du Saint-Esprit pour manifester les œuvres du royaume ;
Et les œuvres du royaume on les reçoit avec un esprit humble.

"Heureux les pauvres en Esprit car le royaume des cieux est à eux".

"Les pauvres en Esprit", ce sont ceux qui ne cherchent pas à briller intellectuellement, à accumuler savoir sur savoir, non: ce sont ceux qui ont la certitude de ne connaître que bien peu de choses et surtout pas l'essentiel.

Alors bien sûr la controverse existe, et on la sent venir,
Jésus utilisait des paraboles... Mais n'était-ce pas pour ne pas blesser ses auditeurs ?
N'était-ce pas pour aider à comprendre son message, et à le rendre plus vivant et plus accessible à la majorité ?

Eh bien en partie seulement,
Car Jésus n'avait pas que cette intention avec les paraboles. Elles étaient destinées plutôt à cacher la vérité aux faux croyants de peur qu'ils ne se convertissent.
(Rappelez-vous mon message il y a un mois environ sur le retour de Jésus: "le loup dans la bergerie" et la parabole de Jean chapitre 10)

Jésus donc à ce moment-là, voilait la vérité.
Il la disait mais en y mettant un filtre, visible uniquement par le Saint-Esprit.

Mais quand il devait parler crûment, il ne se gênait avec personne:

"Arrière de moi Satan " dit-il à Pierre son disciple.
"Race de vipère, tombeaux blanchis" traitait il les religieux.
Ou :" vous ne croyez pas, parce que vous n'êtes pas de mes brebis. Mes brebis entendent ma voix; je les connais, et elles me suivent.…"

Alors pourquoi aujourd'hui tant de croyants se sentent incapable de dire ce qu'ils pensent, déjà dans leur assemblée ?
Pourquoi sont-ils si timorés ?
Pourquoi sont-ils si craintifs?

Les raisons on n'en a évoqué plusieurs au début,
* par peur de perdre l'estime de l'autre,
* Par peur de perdre leurs privilèges ou
* d'entacher leur image,
* par manque de courage, aussi, etc.

Mais il y a plus important.

C'est de se taire par peur de celui ou de celle qui représente une certaine fonction; alors on n'ose plus lui dire les vérités qu'il devrait entendre.

Il y a un phénomène de transfert à ce moment -là.
Le transfert est un phénomène psychique mis en lumière récemment, par la psychanalyse.
C'est un processus selon lequel la personne projette l'image et les sentiments qu'il éprouve, d'une personne sur une autre.
Dans notre contexte, le transfert s'explique dans le fait que la créature a pris la fonction et la place du Créateur.
L'homme a remplacé Dieu.

Cela se traduit par la peur de s'opposer aux serviteurs de Dieu, ou la crainte d'aller contre les anciens de l'Eglise, contre ceux qui ont reçu l'onction, ceux possédant des dons plus importants qui les "placeraient" au-dessus de vous.
Le transfert est bien là ; et c'est bien lui qui pose le plus de problèmes dans les assemblées aujourd'hui.

Car en s'opposant à l'homme, les croyants pensent alors s'opposer à Dieu lui-même (on n'hésite pas à prendre l'exemple de Nombres 12, l'histoire de Marie et d'Aaron, qui parlèrent contre Moïse et sur qui la colère de Dieu s'enflamma ; une stratégie efficace pour maintenir les laïcs sous la crainte et le contrôle du clergé).

Attention:
Si dans la communion fraternelle une personne est placée au-dessus des autres, tout est faussé, et le Saint-Esprit est lié. Vous pensez même à tort que si vous contestez, vous remettrez en cause ce que Jésus a établi. 

Et l'anormal vous paraîtra normal.
Vous changerez alors le mal en bien. 

Un exemple de la vie courante des assemblées :
 "Mon pasteur est obligé de mentir, mais c'est normal, c'est un pieux mensonge, il fait cela pour le bien de tous. Il le fait car il est exubérant et très démonstratif, il aime montrer la puissance de Dieu, alors c'est vrai que parfois il a tendance à exagérer un peu la situation et en faire et en dire un peu de trop. Mais c'est pour exercer la foi;
c'est pour faire monter la foi de celui qui attend un miracle, qui s'attend à une manifestation surnaturelle. C'est pour une bonne et louable cause. Ce n'est pas vraiment dissimuler les choses, c'est juste un peu les exagérer.
"

Je suis sûr que beaucoup de croyants pensent et agissent de la sorte.

Et bien ça, c'est un signe de l'apostasie! C'est un signe que la vérité est devenue mensonge. 


Paul dans Romains chapitre1 à partir du verset 18, nous met en garde face à cette déviance :

" se vantant d'être sages, ils sont devenus fous [...] eux qui ont changés la vérité de Dieu en mensonge, et qui ont adoré et servi la créature au lieu du Créateur "
La colère de Dieu se révèle du ciel contre ces croyants-là. 

L'apostasie (de la racine "apostasion" en grec) c'est une action officielle qui rompt un contrat, un engagement, c'est un divorce. Mais ce qui est plus grave : c’est un divorce entre le croyant et Christ (on divorce lorsqu'il y a adultère; et là l'adultère c'est de changer de Dieu).
Ne mâchons pas les mots, accepter ce type de relation dans l'Eglise c'est accepter la rébellion contre Christ.

Ne pensons surtout pas être à l'abri. L'esprit de séduction est sur le monde et en conséquence:
L'apostasie peut vite s'installer et d'une manière très sournoise. 

par exemple :
Dès que dans une assemblée, on commence à ne plus vouloir dire les choses, ou à l'inverse, à parler n'importe comment, par la chair (comme dans l'Eglise de Corinthe), alors la porte du temple des croyants s'ouvre aux démons à ce moment là et la femme, l'Eglise, est blessée au talon, elle saigne, mais ce sang qui coule est impur. Il n'est plus purifié par Jésus, car Dieu a été mis dehors.

C'est pourquoi nos doutes, nos idées, nos avis, mais aussi nos épreuves doivent
être extériorisées, exprimées par la parole, au sein de la communion fraternelle, afin de pouvoir s'exhorter mutuellement, de pouvoir se reprendre en douceur dans l'amour.
Si la parole n'est pas libre et si elle n'est pas libérée (dans le sens de ne pas la garder captive) on laisse rentrer un venin mortel: l'amertume, la résignation puis le rejet ou la soumission idolâtre.


Alors revenons à la question du début: 

Doit-on dire la vérité, toute la vérité ?

J'affirme que oui, mais le moment, la forme, le lieu n'émanent pas de notre volonté.
Nous ne sommes pas suffisamment sages pour prendre ce genre de décision, seul.
La vrai sagesse vient d'en haut.

Nous devons prier le Seigneur qu'il nous inspire, qu'il mette les mots dans notre bouche, et qu'il mette la paix dans notre cœur.

Puis nous verrons que c'est lui et lui seul, qui provoquera la situation idéale à ses yeux. Peut-être pas aux nôtres, mais c'est cela marcher par l'Esprit et non par la chair. C'est lui faire confiance totalement : S'abandonner complètement à lui.

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